11 octobre 2020

Blogue #JourneeDeLaFille

 

Nelly Bassily, notre directrice des initiatives jeunesse et des relations internationales et chef de projet du rapport de recherche sur les filles sans barrières a pris le temps de rédiger cet article sur ce rapport publié en mai 2020.

 

 

Le rapport de recherche Filles sans barrières est né du fait que DAWN Canada a publié un rapport intitulé Plus qu’une note de bas de page en mars 2019. Le rapport a démontré que les femmes en situation de handicap sont parmi les plus marginalisées de la société canadienne.

Ce que cela signifie concrètement, c'est que les femmes en situation de handicap sont confrontées à de multiples obstacles pour accéder à des choses comme l'emploi, les services de santé, les droits sexuels et reproductifs, et sont également plus à risque de subir des violences basées sur le genre. Mais ce que cette recherche a également montré, c'est le manque de données sur les filles en situation de handicap. Le rapport de recherche Filles sans barrières est donc une première étape pour combler cet écart. Au cours de cette recherche, nous avons trouvé difficile d'accéder aux statistiques canadiennes sur les filles en situation de handicap. Le rapport de recherche Filles sans barrières visait non seulement à passer en revue la littérature qui existe déjà sous la forme d'articles académiques et de rapports produits par les communautés / activistes sur les droits des filles et des jeunes femmes en situation de handicap, mais il cherchait aussi intentionnellement à mieux comprendre les réalités des filles et des jeunes femmes en situation de handicap qui doivent non seulement faire face au capacitisme comme système d'oppression, mais aussi au racisme, au colonialisme, au sexisme, à l'hétéropatriarchie et à d'autres systèmes d'oppression à mesure qu'ils se recoupent et affectent leur vie.

Ce rapport est un projet de recherche exploratoire. Il s'agit d'un premier pas vers le développement et le soutien d'études qualitatives menées par et pour les filles et les jeunes femmes en situation de handicap au Canada.

 

 

 

Bien que nous ayons pris soin de citer des données reflétant la multiplicité des expériences vécues par les filles et les jeunes femmes en situation de handicap, ce rapport ne prétend pas englober toutes leurs expériences.

Et c'est pourquoi aujourd'hui, avec le rapport de recherche Filles sans barrières, nous mettons effectivement en lumière les conditions de vie des filles et des jeunes femmes en situation de handicap, aujourd'hui et dans le futur. Ce rapport fait partie d'un projet plus vaste, dirigé par DAWN Canada, également appelé Filles sans barrières. Financé par la Fondation canadienne des femmes, le projet Filles sans barrières vise à changer la culture au sein des organisations au service des filles en favorisant une prise en compte attentive, diligente et approfondie des besoins des filles en situation de handicap et des filles Sourdes.

Nous avons également été honorées que l'artiste Kay Nau ait accepté notre invitation pour illustrer notre rapport. Leurs illustrations démontrent un travail extrêmement méticuleux en termes de représentation, qui met en images des filles et des jeunes femmes en situation de handicap dans toutes leurs complexités, leurs forces et leur résilience.

Concernant le rapport de recherche, voici quelques faits saillants importants:

  • Tout d'abord, nous voulons souligner le manque d'études et de données statistiques disponibles au Canada pour mieux comprendre les conditions de vie des filles et des jeunes femmes en situation de handicap.

 

  • Nous notons qu'en dépit de l'engagement international (par ratification) du gouvernement canadien à respecter et à appliquer les droits humains, les filles et les jeunes femmes en situation de handicap restent sous-représentées dans les sphères juridique et politique.

 

  • Nous constatons qu'il y a un manque d'études canadiennes et de données statistiques sur la violence faite aux filles et aux jeunes femmes en situation de handicap au Canada qui nous permettraient de comprendre l'ampleur du phénomène. Différentes recherches et rapports internationaux nous permettent cependant d'identifier que les filles et les jeunes femmes en situation de handicap sont l'un des groupes les plus à risque d'être victimisés.

 

  • Nous notons également dans le rapport l’augmentation de l’incarcération des jeunes femmes en situation de handicap. À travers un système scolaire normatif, capacitiste, sexiste et raciste, nous constatons que les filles et les jeunes femmes racialisées en situation de handicap sont particulièrement touchées par ce problème. Nous soulignons également dans notre rapport, les conditions vécues par les filles au statut d'immigration précaire dans les centres de détention. L'emprisonnement lié à l'immigration affecte les filles et les jeunes femmes migrantes et sans statut. Le Conseil canadien pour les réfugiés (CCR) a dénoncé la présence d'enfants dans les centres de détention. En 2018-2019, selon le CCR, le Canada a détenu plus de 118 enfants. Ces enfants, qui ont été criminalisés en raison de leur statut migratoire, ont également été détenus dans des environnements traumatisants. Une lettre ouverte signée par plus de 2000 professionnels de la santé au Canada souligne que ces conditions de détention auront des conséquences négatives sur la santé de ces enfants et pourraient entraîner la création de handicaps chez les enfants à long terme.

 

  • Le rapport met également en lumière les filles et les jeunes femmes autochtones en situation de handicap vivant dans des réserves (éloignées des grands centres urbains) qui doivent faire face à la discrimination coloniale et raciale quotidienne qui contribue à entraver leur vie et leur développement.

 

  • Le rapport souligne que les filles et les jeunes femmes en situation de handicap sont confrontées à des obstacles pour accéder à une éducation sexuelle inclusive et autonomisante. Leurs droits sexuels et reproductifs sont limités et leurs identités de genre et orientations sexuelles sont rarement respectées. Compte tenu des différentes données que nous avons collectées, nous savons également que les filles et les jeunes femmes en situation de handicap confrontées à différents systèmes d'oppression sont plus à risque de voir leurs droits reproductifs entravés et d'être stérilisées sans consentement.

 

 

 

  • La littérature concernant spécifiquement les jeunes en situation de handicap qui s'identifient comme LGBTQIAP2S + (Se réfère aux bispirituels, lesbiennes, gays, bisexuels, trans, queer, intersexués, asexués / aromatiques, pansexuels et plus) dénonce, entre autres, l'imposition de standards hétéronormatifs lorsqu'il s'agit d'identité de genre et / ou d'orientation sexuelle

 

  • L'accès à l'éducation est un droit particulièrement réduit pour les filles et les jeunes femmes en situation de handicap vivant au Canada. Des études montrent que de nombreux espaces scolaires restent inaccessibles. Les problèmes d'adaptation limitent ainsi leur accès à de nouvelles connaissances, au développement de leur plein potentiel et aussi à la possibilité de créer et de renforcer des relations.

 

  • La participation des filles et des jeunes femmes en situation de handicap aux activités de loisirs et de sports a des effets positifs significatifs sur leur estime de soi. Cependant, le rapport montre qu'en dépit de l'importance de leur participation à ces activités, les filles et les jeunes femmes en situation de handicap restent sous-représentées. L'accessibilité est toujours un obstacle majeur, et nos collaborations pour rendre les programmes destinés aux filles plus inclusifs nous montrent qu'il reste encore beaucoup de travail à faire pour sensibiliser davantage à ce qu'est le capacitisme et à son fonctionnement afin de mieux répondre aux besoins des filles et jeunes femmes en situation de handicap.

 

  • Et le dernier point fort que je vais mentionner est la façon dont les filles et les jeunes femmes en situation de handicap sont souvent isolées, ce qui nuit à leur capacité de créer des cercles sociaux et des liens affectifs. Notre travail nous a permis de montrer que les espaces permettant aux filles et jeunes femmes en situation de handicap de tisser de tels liens sont particulièrement importants

 

 

Le projet Filles sans barrières sera financé pour quatre ans additionnels jusqu'en 2024 et au cours de cette période, nous prévoyons de faire une recherche qualitative qui nous permettra directement d'entendre les expériences directes des filles en situation de handicap et des filles Sourdes.